Sentinelle - L'histoire de Ron Moyes
Ronald « Shorty » Moyes, aviateur de deuxième classe âgé de 17 ans, peu après son enrôlement en septembre 1943. Photo: Moyes Family Collection
Introduction par Dave O’Malley
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le mitrailleur arrière du Bomber Command assumait le rôle le plus dangereux et, en fin de compte, le plus meurtrier de tous les combattants. Sur les 125 000 membres d'équipage du Bomber Command qui ont participé à la guerre, 55 573 ont été tués, soit un taux démesuré de 45 % de l'ensemble des membres d'équipage opérationnels. Pour mettre les choses en perspective, la 8e armée de l'air des États-Unis - la Mighty Eighth - comptait 350 000 membres d’équipages navigants, dont 26 000 ont été tués au combat, soit un taux de mortalité de 7,45 %, un prix terrible à payer, mais quand même insignifiant comparé à celui du Bomber Command. Il serait logique de conclure que les morts du Bomber Command seraient relativement répartis entre tous les postes de l'équipage de l'avion - pilote, navigateur, opérateur radio, ingénieur, viseur de bombes, mitrailleur intermédiaire et mitrailleur arrière or il existe une asymétrie étonnante dans les morts à bord d'un bombardier. Parmi les 55 573 morts dans les bombardiers de la Royal Air Force, environ 22 000 étaient des mitrailleurs arrière, soit 40% des morts malgré représentant seulement 14 % des membres d'équipage. Au cours de la guerre, le Fighter Command a perdu 3 690 pilotes tués au combat ou dans des accidents. Étonnement, au cours de cette même période, plus de six fois plus de mitrailleurs arrière ont trouvé la mort!
Plusieurs causes viennent à l'esprit pour expliquer cette asymétrie. Tout d'abord, le Bomber Command opérait plutôt de nuit et les chasseurs de nuit choisissaient presque toujours d'attaquer un bombardier en l’approchant par derrière, dans l’angle mort sous son sillage . En général, l'équipage du bombardier ne se rendait compte de la présence d'un chasseur de nuit que lorsque son pilote ouvrait le feu, arrosant le bombardier et son mitrailleur arrière, exposé dans ce cas au premier rang, de balles traçantes. Lors d'une telle attaque, malgré le fait que le pilote du bombardier pouvait s'échapper en lançant l’appareil en manœuvres d’échappées dites de tire-bouchon, à son retour à la base, il trouvait souvent son mitrailleur arrière soit mort dans sa tourelle, soit complètement disparu. Selon l'écrivain scientifique Tom Whipple dans The Battle of the Beams, lorsqu'un chasseur de nuit guidé par radar s’attaquait à un bombardier, il réussissait à l'abattre dans 60 % des cas.
Deuxièmement, il était extrêmement difficile de s’extirper d'une tourelle arrière si le pilote ordonnait l'abandon de l'appareil. Vêtu d’épais vêtements molletonnés, le mitrailleur arrière devait, soit ramper vers l'arrière dans le fuselage (après avoir récupéré et attaché son parachute) parcourant la plus grande distance possible jusqu'à la trappe d'évacuation (la porte principale dans le cas du Lancaster), soit, selon l'appareil, faire pivoter sa tourelle à gauche ou à droite et se laisser tomber dans le vide par l'ouverture prévue. Dans le cas d’une panne du système hydraulique, pivoter la tourelle n’était pas chose facile pour aligner les ouvertures avec l'une ou l'autre option. Il faut savoir qu’une telle lutte désespérée se déroulerait sous les forces gravitationnelles écrasantes d'un bombardier tombant en vrille vers le sol.
Les jeunes mitrailleurs arrière du Commonwealth n’auraient pas connu ces terrifiantes statistiques de l'après-guerre, cependant ils étaient parfaitement conscients qu'ils occupaient dans leur appareil le poste le plus dangereux, aux premières loges du feu ennemi. Pour eux, aucune présence réconfortante des collègues à portée de main, à portée de vue et à portée de contact tout comme le cas du pilote, du navigateur, du viseur de bombe, de l'ingénieur et de l'opérateur radio à l'avant. Il était facile pour le mitrailleur dorsal au milieu du fuselage de se laisser tomber dans le fuselage et venir à l'avant. Le mitrailleur arrière se trouvait à 15 mètres ou plus à l'arrière, dans la queue de l'appareil, isolé de la présence réconfortante de ses coéquipiers par les portes claustrophobes de sa tourelle, les longerons des stabilisateurs et des ailes, le fuselage sombre,relié que par un fragile fil d'interphone et les rares communications du pilote. Il était seul, avec ses pensées et ses peurs. Au-dessus du territoire ennemi et même au-dessus de l'Angleterre, il s'efforçait à déceler pendant des heures un chasseur de nuit se faufilant dans la noirceur et l'obscurité. Et lorsqu'il l'apercevait, un combat mortel s’ensuivait.
Voici l'histoire d'un de ces héros, l'adjudant de deuxième classe Ron « Shorty » Moyes, mitrailleur arrière au sein du 429e escadron doté des bombardiers Halifax, pour ensuite passer au 405e escadron Pathfinders sur les bombardiers Lancaster. Il a réussi à défier les 16 % de chances (probablement moins de 10 % pour les mitrailleurs arrières) de survivre à un déploiement opérationnel complet (soit 30 missions) et de revenir sain et sauf pour nous raconter son expérience.
Ron Moyes s’éteint le 10 janvier 2025 à Ottawa au cours de sa 99e année. À l'âge de 80 ans, il a rédigé un court mémoire sur ses expériences de guerre, qui a été publié en huit parties dans Observair, le bulletin de la succursale d'Ottawa de la Société historique de l'aviation canadienne (SHAC). Ce testament, écrit avec clarté et humilité, est un hommage durable au lien créé entre les membres d'un équipage de Bomber Command. Normalement, à la fin des hostilités, la plupart des équipages se dissipaient et pour la plupart, les membres perdaient le contact. Ce n'étaient pas le cas pour l 'équipage Walkley (les équipages portaient toujours le nom du pilote commandant). Cet équipage est resté en contact jusqu'à ce que Ron atteignent ses 70 ans, preuve de l'amour que ces six Canadiens ont connu en temps de danger mortel. Avec l'aimable autorisation du SHAC, nous le présentons ici dans son intégralité.
À la grâce de Dieu
par le Sergent de section Ron Moyes
J'ai prêté serment dans l'ARC le 16 septembre 1943. Je me souviens que mes parents ont dû signer un formulaire de consentement, car je n'avais que 17 ans. Le 17 septembre 1943, je suis arrivé au dépôt du personnel no 3 à Edmonton. C’est là que nous avons vite compris qu'un caporal avait le pouvoir d'un général et nous avons appris la discipline à la dure, mais nous avons persévéré.
Mon frère aîné était outre-mer en tant que mécanicien de moteur d'avion au sein du Bomber Command depuis 1941. Il m'a dit que le moyen le plus rapide d'aller outre-mer était de suivre une formation de mitrailleur. Je n'ai découvert que plus tard que les mitrailleurs aériens avaient le taux de pertes le plus élevé. Mais Dieu merci, les circonstances s’amélioraient. Après un mois d'apprentissage de l'entretien ménager, de marche et de piqûres contre toutes les maladies du monde, nous avons été transférés au détachement de formation pré-équipage no 9 à l'Université McGill, à Montréal. L'ARC avait pris possession d'une résidence et de quelques salles de classe. Là, nous avons suivi des cours de mathématiques, de sciences, et surtout de morse et de reconnaissance des avions. Le code morse nous rendait tous fous. Comme tout le monde apprenait l'alphabet en morse, on n'entendait que Di, Da, Di, Da. Nous avons également appris à lire le morse envoyé par lampe Aldis, ce qui, d'après l'expérience des opérations ultérieures, était plus important pour nous. Nous étions environ 80 et nous devions réussir ce cours avant de passer au cours principal de mitrailleur aérien.
Bing Crosby et de nombreuses autres célébrités se sont produits pour les militaires alliés à la Stage Door Canteen de New York. Photo: nationalww2museum.org
À McGill, trois d'entre nous ont obtenu un laissez-passer de 96 heures pour le week-end de l’Action de Grâce et nous avons décidé de nous rendre à New York. Après l’achat de nos billets de train, il ne nous restait qu’environ 12 $ chacun. À New York, nous sommes arrivés à la gare Grand Central avant de nous présenter au bureau du R.T.O. Ils nous ont guidés vers l'U.S.O. à la fameuse Stage Door Canteen, où ils nous ont accueillis et nous ont donné des billets pour un hébergement dans un petit hôtel. Nous avons également reçu des billets pour voir l'orchestre de Glen Miller, ainsi que des billets pour le Radio City Music Hall, l'Empire State building et un film de notre choix. Nous nous sommes bien amusés et avons tout vu, y compris notre première télévision, qui mesurait environ 30 centimètres, dans la gare Grand Central; une foule immense nous regardait. Lorsque nous sommes rentrés à Montréal, il nous restait encore de la monnaie dans nos poches - impossible aujourd'hui !
Le transport ferroviaire des militaires en temps de guerre mérite d'être mentionné. Un billet de Vancouver à Halifax nous coûtait 15 $, plus 75 ¢ pour le petit déjeuner, 1 $ pour le dîner et 1,25 $ pour le souper. On parle ici de repas complets. Une couchette pour une nuit coûtait 1,00 $. Cela semble plutôt bon marché aujourd'hui, mais quand on pense que notre solde d'aviateur n’était alors qu’environ 35 $ par mois, dont nous cédions 15 $ à nos parents, il nous restait 10 $ toutes les deux semaines pour le nécessaire tel le savon, le dentifrice, les cigarettes, etc. En bout de ligne, nous nous en sortions bien.
Après l'école de formation des équipages, nous avons été transférés à l'école de bombardement et de mitrailleur no 9 à Mont-Joli, au Québec, à l’embouchure du golfe du Saint-Laurent. Quel choc pour nous les gens de l’Ouest canadien : la neige atteignait les supports croisés des poteaux téléphoniques et il faisait froid, entre moins 25 et moins 30 degrés, avec un vent provenant du golfe !
Nous avons poursuivi une formation pour reconnaître la différence entre les profils des avions ennemis et amis, ainsi que pour transmettre et lire le code morse à des vitesses plus élevées. Nous avions également appris à démonter et remonter des mitrailleuses Browning .303, tout en apprenant le nom de toutes les pièces et leur rôle. Nous avons également effectué des vols à bord d'avions Fairey Battle, dans lesquels nous avons tiré avec les canons au-dessus du Golfe. Si les canons gelaient, comme c'était souvent le cas, nous larguions les munitions restantes. Elles atterrissaient dans l'eau ou sur la glace, peu importe, du moment qu'on s'en débarrassait.
Nous avons été promus sergents pour ensuite recevoir l'insigne de mitrailleur aérien à coudre. Notre solde a augmenté, passant à environ 3 dollars par jour. On nous a aussi donné 30 jours de congé pour rentrer chez nous, ce qui était bien.
Ron Moyes (en haut) s'attaque au filet d'escalade sur le parcours d'assaut de l'École d'entraînement physique du personnel navigant à Valleyfield, au sud-est de Montréal Photo: Moyes Family Collection
Après notre permission le 12 avril 1944, nous nous sommes présentés à Valleyfield, au Québec, où nous avons suivi l'école d'entraînement physique du personnel navigant. C'était un très bon cours. L'entraînement était très dur sur le plan physique, mais on nous nourrissait bien. En attaquant le parcours d'assaut tous les jours, nous étions rapidement en très bonne forme. Le 23 avril 1944, nous avons été transférés à Lachine, au Québec, où nous attendions de partir outre-mer. Le 2 mai 1944, nous avons quitté Montréal en train pour Halifax afin de prendre l'Empress of Scotland, qui est parti le 3 mai.
Il y avait environ 80 mitrailleurs aériens à embarquer et de la passerelle, nous avons été dirigés vers le pont supérieur où il y avait des appentis en toile sous lesquels se trouvaient des couchettes, empilées trois de haut. Il y avait environ 30 couchettes, puis une cloison en toile, 30 autres couchettes, une autre cloison, 30 autres couchettes. Nos couchettes faisaient deux pieds de large, avec un oreiller rond et deux couvertures. La première nuit, nous avons presque gelé; il n'y avait pas de chauffage et l'Atlantique est froid et misérable à cette époque de l'année. Nous avons pris tout ce que nous pouvions dans notre fourbi pour nous couvrir. Pendant neuf jours, nous n'avons jamais quitté nos vêtements, c'était horrible.
À bord, nous avons été affectés auprès des canons pour la surveillance aérienne, c'est-à-dire manier des canons antiaériens de 40 mm positionnés sur le pont supérieur. On nous expliquait en dix minutes comment les faire fonctionner, et c'est tout. Chaque groupe de 30 hommes se voyait attribuer un quart, qui coïncidait avec le quart de service des marins. Notre navire était seul, sans escorte avec plus de 3 000 soldats à bord.
L'Empress of Scotland du Canadien Pacifique a revêtu une peinture gris cuirassé pendant sa période de transport de troupes alliées dans l'Atlantique. À l'origine, il avait été construit comme paquebot de luxe pour les liaisons transpacifiques et lancé sous le nom d'Empress of Japan, mais en 1942, à la suite des attaques japonaises sur Pearl Harbor, Singapour et Hong Kong, il a été rebaptisé Empress of Scotland. En 1943 et 1944, l 'Empress of Scotland a effectué douze voyages transatlantiques aller-retour, transportant des troupes depuis New York et d'autres ports d'Amérique du Nord en vue de l'invasion de l'Europe. Malgré l'activité intense des sous-marins dans l'Atlantique Nord, il s'en sortira indemne. Photo: Musée impérial de la guerre
Nous avons débarqué à Liverpool le 12 mai 1944 et été acheminés par train au Centre de réception du personnel à Innsworth, Gloucester. Auparavant, tout le personnel de l'ARC s'était rendu à Bournemouth, sur la côte sud, mais à l'approche du jour J, le personnel a été déplacé à l'intérieur des terres. Lorsque j’ai intégré la caserne qui m'avait été attribuée, j’ai été surpris de retrouver la photo de ma sœur. Je me suis demandé qui l'avait et pourquoi. Il s'est avéré que c'était Fred Jones, un voisin et un mitrailleur aérien aussi. Nous nous sommes retrouvés dans le 405e escadron plus tard l'année suivante.
Depuis Innsworth, nous avons été envoyés dans différentes unités d'entraînement opérationnel (OTU). Une vingtaine d'entre nous ont été assignés à l'OTU n° 82 à Ossington, dans le Nottinghamshire. Il s'agissait d'un changement important, car c'est là que nous avons rencontré les hommes avec lesquels nous allions voler pendant le reste de la guerre.
Entraînement opérationnel
À l'OTU n° 82, à Ossington, dans le Nottinghamshire, les différents membres d'équipage étaient rassemblés en fonction de leur métier: pilotes, navigateurs, viseurs de bombes, mitrailleurs aérien radiol et mitrailleurs aériens. Tous les membres d'équipage, à l'exception des pilotes, portaient qu’une seule aile sur leur poitrine: la lettre “N” pour Navigateur; “B” pour Viseur de bombes; “E” pour Ingénieur; “WAG” pour Wireless Air Gunner (Mitrailleur aérien radio); et “AG” pour Air Gunner (Mitrailleur aérien).
Venant de différentes unités d'attente ou stations d'entraînement en Grande-Bretagne, nous sommes tous (c'est-à-dire les membres de notre futur équipage) arrivés à cette station à peu près le même jour. Un jour particulier, nous avons tous été rassemblés par la section de vol. On a dit aux pilotes d'aller choisir eux-mêmes un équipage parmi ceux qui étaient rassemblés. Notre futur pilote, Don Walkey, est donc allé demander à notre futur navigateur, Hugh Ferguson, s'il voulait se joindre à son équipage. Fergy a répondu « O.K. » Don a alors dit : « O.K., tu vas choisir le reste de l'équipage. » C'est donc Fergy qui nous a tous choisis.
Le lieutenant d'aviation Don Walkey, de Pincher Creek, en Alberta, s'est engagé dans l'ARC à l'âge de 18 ans, en 1941, pour suivre une formation de pilote. Après avoir obtenu ses ailes, il a reçu sa commission d’officier et affecté à un poste d'instructeur de vol au Canada. Il a finalement pu quitter ce poste en 1944.
Le Sous-lieutenant d'aviation Hugh « Fergy » Ferguson, de Winnipeg (Manitoba), s'est engagé dans l'ARC au début de 1943 pour suivre une formation de navigateur. Après avoir obtenu ses ailes, il a reçu sa commission d’officier et affecté outre-mer. Avant de se joindre à l'ARC, il avait exploité des mines abandonnées dans tout le Manitoba.
Le Sous-lieutenant d'aviation Stuart « Stu » Farmer, de Sault Ste. Marie, en Ontario, s'est enrôlé dans l'ARC à l'âge de 22 ans, en 1943, pour suivre une formation de viseur de bombes. Il est devenu officier et s'est marié juste avant de partir outre-mer.
Fils d'un fermier, le sergent Alvin « Al » Kuhl a grandi à Tara, en Ontario. Al s'est engagé à l'âge de 22 ans, en 1943, pour suivre une formation de mitrailleur aérien avant d’embarquer outre mer au printemps 1944.
Le sergent de section Jake « Red » Redinger s'est engagé dans l'ARC en 1941 à l'âge de 25 ans. Il est originaire de Bashaw, en Alberta. Après avoir obtenu son diplôme de radiotélégraphiste, il est affecté au Commandement aérien de l'Est, en Nouvelle-Écosse, où il effectue des patrouilles côtières à bord des appareils Hudson. Après de nombreuses opérations, l'équipage est choisi pour acheminer des avions outre-mer avec le Ferry Command. Red est l'un des deux radiotélégraphistes de l'équipage; le Ferry Command n'en exige qu'un seul. Pour déterminer celui qui partirait, les deux ont joué à pile ou face; Red a perdu. Plus tard, tous les membres de l’équipage du gagnant ont été tués en remorquant des planeurs.
Enfin, breveté mitrailleur arrière, le sergent Ron « Shorty » Moyes, de Coquitlam, en Colombie-Britannique est prêt. « J'avais quitté l’école secondaire pour m'engager en 1943, à l'âge de dix-sept ans.»
L'équipage Walkley. De gauche à droite : Sergent Ron « Shorty » Moyes, mitrailleur arrière; Sous-lieutenant d'aviation Hugh Ferguson, navigateur; Lieutenant d'aviation Don Walkley, pilote; Sous-lieutenant d'aviation Stuart Farmer, viseur de bombes; Sergent Alvin Kuhl, mitrailleur intermédiaire; Sergent de section Jake « Red » Redinger, radiotélégraphiste. Les rangs sont les mêmes qu'au moment de la photo. Photo: Moyes Family Collection
Construits en 1941, tous ses bâtiments à Ossington sont de type Nissen - le principal type de bâtiment utilisé en Angleterre pendant la guerre - construits en tôle ondulée, de forme semi-cylindrique, dont le sol était couvert de dalles en béton. Il y avait un hangar pour abriter les avions en réparation. Les baraquements des sous-officiers - également des huttes Nissen - se trouvaient à environ ¾ de mile du centre de la base. Les baraquements étaient chauffés par un poêle à charbon à ventre creux. Les toilettes se trouvaient dans un bâtiment séparé, avec des lavabos, des douches et des toilettes; le seul problème était qu'il n'y avait ni chauffage ni eau chaude.
Comme l'avion Wellington et son équipement étaient nouveaux pour nous tous, les premiers jours ont été consacrés à l'apprentissage de l'équipement. Réuni comme équipage nous avons effectué de simples décollages et atterrissages, pour ensuite progresser vers de courts vols de navigation, suivis de vols d'entraînement au bombardement et enfin de vols d'entraînement au tir au-dessus de la mer du Nord.
Lors d'un vol d'entraînement à la navigation de nuit au-dessus de la mer du Nord, j'ai vu une lumière clignoter derrière nous. Je l'ai dit à Don qui m'a demandé si c'était une lettre en morse envoyée par Aldis. J'ai regardé à nouveau et j'ai répondu : « Oui, la lettre Untel ». Il a immédiatement demandé à Red de tirer les « couleurs du jour ». Chaque avion était équipé d'un pistolet Very capable de tirer des cartouches de fusée éclairante de 1½ x 4 pouces. Les cartouches projettaient deux étoiles; il pouvait s'agir d'une étoile rouge et d'une étoile verte, ou de deux rouges, ou d'une rouge et d'une jaune, d'une verte et d'une jaune, ou de n'importe quoi d'autre. Red a donc déclenché la couleur prévue pour la journée et le clignotement a disparu. Don nous a dit plus tard qu'il s'agissait probablement d'un chasseur de nuit ami, mais que si nous n'avions pas répondu correctement, il nous aurait tiré dessus. Pour survivre il faut savoir comment apprendre en cours de route.
Une autre nuit, nous devions effectuer un entraînement au bombardement de nuit. Don et un autre pilote, Ray Charlton, avaient parié sur celui qui serait le premier à décoller cette nuit-là. Nous nous sommes rendus à nos avions respectifs, assez éloignés l'un de l'autre, ce qui signifiait que nous devions rouler plus longtemps au sol depuis nos positions de dispersion jusqu'à la piste d'atterrissage. Les deux avions se dirigeaient vers le même point avant de s'engager sur la piste. Je ne me souviens plus si c'était Stu ou Fergy, mais l'un d'eux a crié dans l'interphone d'attendre. Don a perdu le pari.
Lors d'un autre vol d'entraînement au bombardement de nuit, un avion Wellington a explosé juste devant nous; il n'y a eu aucun survivant et nous n'avons jamais su ce qui avait causé l'explosion.
Nous avons terminé notre entraînement opérationnel sur Wellington le 4 septembre 1944. Le lendemain, nous étions en route pour l'école des équipages du 6e groupe à Dalton pour un cours de deux semaines sur comment s’évader et fuire au sol si nous avions à parachuter parmi l’ennemi. Là, on nous a appris à cacher nos parachutes ou à les découper pour nous réchauffer si nous étions obligés d’évacuer notre appareil au-dessus du territoire ennemi. Nous étions dotés de stylos, de pipes, etc., tous munis d'une petite boussole. Nous avons appris à rationner les rations contenues dans nos kits d'évacuation et comment approcher des fermes, etc. C'était un cours très intéressant; heureusement, nous n'en avions jamais eu besoin.
Le 19 septembre 1944, nous sommes arrivés à l'unité de conversion lourde n° 1659 (HCU) à Topcliffe, dans le Yorkshire, juste au nord de la ville de York. C'est là que nous avons laissé le Wellington bimoteur pour se qualifier sur les Halifax Mk. III quadrimoteurs. Cela représentait également un changement pour les mitrailleurs, car les tourelles des Wellington étaient actionnées par commande hydraulique, alors que les Halifax avaient des tourelles Bolton Paul à commande électrique, ce qui était très différent. De plus, nous avions un mécanicien de bord, le sergent Doug Durkin de Meaford, en Ontario, qui s'asseyait à côté du pilote et s'occupait de l'approvisionnement en carburant, etc. L'un des premiers mécaniciens de bord formés au Canada, il avait peu d'expérience lorsqu'il nous a rejoints, avec seulement 13 heures de vol au total.
Créée en tant que station de la RAF juste avant la guerre, les hangars et bâtiments de la station Topcliffe étaient tous en brique. Mais il n'y avait pas assez de logements pour les sous-officiers de l'armée de l'air, alors ils nous ont logés dans une grande propriété à environ 3,5 km du camp. Tous les sous-officiers de notre équipage étaient logés dans la même pièce. Chaque pièce était équipée d'une petite cheminée alimentée par du coke, un sous-produit du charbon. Nous avions droit à un seau de coke par semaine, juste assez pour une nuit. Nous avons dû casser les volets et tout autre bois que nous pouvions trouver pour nous chauffer.
Nous avons accompli beaucoup d'entraînement en octobre avant d’être affectés à l'escadron no 429 à la station de l'ARC à Leeming. C’était désormais l’heure des missions réelles.
429e Escadron - Première mission
Nous sommes arrivés à la station de l'ARC Leeming le 29 octobre 1944. Il y avait deux escadrons de bombardiers Handley Page Halifax Mk. III de l'ARC à la station : Le 427e Escadron (Lion) et notre escadron, le 429e Escadron (Bison), parrainé par Lethbridge, Alberta. Leeming était une station de la RAF d'avant-guerre, avec des logements familiaux et des bâtiments permanents en brique, située juste au nord de la ville de York. Les trois officiers de notre équipage se sont retrouvés aux quartiers des officiers, tandis que les sous-officiers ont été affectés à un salon dans l'un des anciens logements familiaux.
Dans la nuit du 30 octobre 1944, afin de se familiariser, notre pilote Don Walkey, a effectué une mission opérationnelle sur Cologne en tant que second pilote avec l'équipage du Capitaine d’aviation D.C. Henrickson. Le 1er novembre, il rejoint l'équipage du Capitaine d’aviation G.W. Bennett à Oberhausen. Pendant la première semaine avec l'escadron, les autres membres de l’équipage ont suivi une formation au sol suivie de quelques vols d'entraînement pour s'habituer à la routine de l'escadron.
Le 16 novembre 1944, nous avons eu le feu vert pour effectuer notre premier vol opérationnel en tant qu'équipage et, comme cela s'est avéré, il s'agissait d'un raid de jour. Debout dès 4h30, nous nous sommes habillés avant de nous rendre au mess des sergents pour prendre notre petit-déjeuner opérationnel. Il se composait d'un œuf au plat, de pommes de terre frites, de toasts et de thé. Avant et après une mission, c'était le seul moment où nous avions des œufs frais. Ensuite, briefing à 9h30 dans une grande salle prévue à cet effet pouvant accueillir jusqu'à 200 hommes. Mais pour ce raid, il n'y avait que 14 équipages, soit une centaine d'hommes.
Après avoir pris place, nous avons regardé le commandant afficher une carte de l'Europe montrant un ruban rouge allant de Leeming à la ville allemande de Jülich, juste à l'est de la vallée de la Ruhr; la vallée de la Ruhr étant la partie la plus industrialisée et la plus lourdement défendue de l'Allemagne. Le ruban rouge ne rejoignait pas directement la base à la cible, mais plutôt, après une certaine distance, tournait d'environ 30 degrés sur une distance déterminée pour ensuite revenir à 50 degrés. On nous a expliqué que ces changements de direction permettaient non seulement d'éviter les zones fortement défendues, mais aussi d'empêcher les Allemands de déterminer la cible exacte, de sorte qu'ils ne pouvaient pas concentrer tous leurs chasseurs sur la cible avant notre arrivée.
Après le briefing, nous connaissions la cible, pourquoi elle avait été choisie, quelles conditions météorologiques nous allions rencontrer, et le nombre d'avions qui allaient participer à la mission. (Le Bomber Command avait été chargé de bombarder trois villes allemandes - Düren, Heinsberg et Jülich - juste au-delà des lignes que les Première et Neuvième Armées américaines s'apprêtaient à attaquer. Une vague de 413 Halifax, 78 Lancasters et 17 Mosquitos des groupes 4, 6 et 8 devaient bombarder Jülich). En terminant nous avons laissé le navigateur et le viseur de bombes tracer la trajectoire pour s’habiller pour la mission.
On nous avait également indiqué l'altitude à laquelle nous devions voler le long de la route, le poids des bombes que nous devions larguer (une bombe à haute capacité (HC) de 2 000 livres, sept bombes anti blindage de 1 000 livres et quatre de 500 livres), l'altitude à laquelle nous devions bombarder (17 000 pieds) et le moment, à la minute près, où nous devions larguer les bombes. C'était très important: tout écart à la trajectoire ou éloignement des autres bombardiers nous rendait vulnérable aux chasseurs ennemis. L'altitude et l'heure d’arrivée sur la cible étaient également importantes, car les bombardiers devaient voler à environ 500 pieds les uns au-dessus des autres, entre 17 000 à 21 000 pieds, et il était donc très important qu’un membre de l'équipage surveille les avions qui se trouvaient au-dessus de nous avec les portes de la soute aux bombes ouverte pour avertir le pilote de s'éloigner avant de se faire écraser par une charge de bombes. Cela s'est produit à de nombreuses reprises lorsque les équipages n'étaient pas suffisamment attentifs. Cela signifiait également qu’une fois la situation évitée et la trajectoire modifiée, il fallait boucler un circuit complet pour recommencer une nouvelle approche sur la bonne trajectoire pour larguer nos bombes. Le risque d’être atteint par la DCA au cours de ce deuxième circuit était beaucoup plus important
« Il était très important que l'un des membres de l'équipage surveille les avions qui se trouvaient au-dessus et dont les portes de la soute à bombes étaient ouvertes pour avertir le pilote s'il devait s'écarter », raconte Moyes. Cette photographie aérienne, prise quelques mois avant l'arrivée de l'équipage du Walkley au Leeming, montre un Handley Page Halifax du 429e escadron (LW127 'AL-F') en vol au-dessus de Mondeville, en France, après avoir perdu tout son empennage tribord sous les bombes larguées par un autre Halifax au-dessus de lui (très probablement par l'avion qui a pris la photo). Trois membres de l'équipage sont tués, un s'échappe et trois sont faits prisonniers de guerre. Photo: Musée impérial de la guerre
Il y avait de nombreuses façons de mourir pour un mitrailleur arrière. Ici. L'équipage au sol inspecte un Lancaster qui est revenu d'un raid de bombardement avec sa tourelle arrière complètement cisaillée par une bombe tombant d'en haut. La tourelle et son occupant malchanceux n'ont jamais été revus.
Après le briefing, nous sommes allés au vestiaire pour nous habiller. Il fallait à tout prix s’assurer de bien vider nos poches: portefeuilles, talons de billets de théâtre, lettres, ou tout ce que les Allemands pourraient utiliser pour identifier notre base ou notre escadrille si nous devions nous échapper. En cas de capture, nous ne devions révéler que notre grade, notre nom et notre service.
Ma responsabilité incluait la distribution des kits d'évasion à chaque équipage, l'un comprenant des cartes et de l'argent européen, l'autre des rations de bonbons à haute teneur énergétique pour permettre de tenir quelques jours. On m'a également donné plusieurs sacs de bonbons, du chocolat non sucré et six tablettes Mars; je n'ai jamais compris pourquoi on ne nous avait donné que six tablettes Mars alors que l'équipage comptait sept membres. Peut-être était-ce parce qu'à l'époque des avions bimoteurs, il n'y avait que six membres d'équipage ? Quoi qu'il en soit, je devais noter qui n'avait pas eu sa tablette de chocolat lors de chaque opération.
Trois membres d'équipage montent à bord de leur Avro Lancaster. La différence entre les vêtements du mitrailleur arrière (à droite) et du mitrailleur intermédiaire (à gauche) en dit long sur les conditions de froid brutales endurées par Ron Moyes et tous les mitrailleurs arrière, même lors d'une mission d’été comme celle qui est décrite. Photo: Musée impérial de la guerre
En tant que mitrailleur arrière, j'ai eu le plus grand mal à m'habiller. Je devais subir un froid extrême qui régnait dans la tourelle arrière; il n'y avait pas de chauffage et toute l'enceinte en plastique à l'avant avait été supprimée pour offrir une meilleure visibilité. Lorsque je volais à une altitude comprise entre 17 000 et 21 000 pieds, la température atteignait entre -40 et -51 degrés F. J'enfilais d'abord de longs bas de laine qui me montaient jusqu'aux genoux, puis un pullover à col roulé en laine, puis mon uniforme de combat, et enfin une fine combinaison chauffée à l'électricité avec des pantoufles et des gants. Par-dessus tout cela, j'ai enfilé ce que j'appelais ma « combinaison d'ours en peluche »; elle était épaisse d'environ un pouce et lourdement rembourrée. Ensuite, j'ai enfilé ma combinaison de vol dotée de plusieurs poches pour transporter mes rations de survie. Nous étions aussi équipés de stylos ou de pipes dans lesquels étaient cachées des boussoles. J'ai ensuite enfilé mon gilet de sauvetage gonflable Mae West, puis mon harnais de parachute. Puis les bottes de vol; elles étaient en cuir et conçues de manière à ce que l'on puisse couper le dessus pour les faire ressembler à une chaussure Oxford. Un petit couteau était inclus dans la botte pour couper le dessus. J'avais aussi mon casque, mon masque à oxygène, mes lunettes et trois paires de gants: une fine paire en peau de chamois, des gants électriques et une paire de gants à manchettes. Je dois mentionner ici que tous les membres du personnel navigant avaient un sifflet attaché au col de leur veste de combat; si vous deviez amerrir ou sauter en parachute de nuit dans la mer du Nord ou la Manche, ce sifflet vous permettait de signaler les uns les autres afin de vous regrouper avant de monter dans le canot pneumatique.
Depuis le vestiaire, nous sommes montés à l'arrière d'un grand camion qui pouvait emmener trois ou quatre équipages vers leur avion. Notre avion pour ce voyage était un tout nouveau Handley Page Halifax Mk. III, MZ482, construit par le London Aircraft Production Group, codé AL-N; « AL » était les lettres d'appel du 429e Escadron, et la lettre « N » identifiait notre avion.
Une fois à bord, nous sommes restés debout à discuter avec l'équipe au sol. Personne ne demandait quelle était la cible, c'était strictement interdit. Mais l'équipe au sol savait à peu près où nous allions grâce à la quantité de carburant mise dans l'avion.
Avant de monter dans l'avion, nous devions tous nous aligner pour notre « petit pipi nerveux », car nous pouvions être partis pendant 5, 6 ou 7 heures, voire plus car une fois à nos postes, nous y restions jusqu'à notre retour. Nous branchions nos intercoms pour attendre le décollage. La tourelle arrière était non seulement le poste le plus exigu mais aussi le plus solitaire de tous. Après le décollage, Don nous appelait, Al, le mitrailleur dorsal, et moi-même, toutes les demi-heures par l'interphone pour nous demander si nous allions bien, et c'est tout ce qu’on avait comme contact.
Le décollage a eu lieu à 12h45. Il s'agissait de notre première mission et nous avons été surpris, en montée, de voir les autres avions si éloignés les uns des autres, et cela a continué jusqu'à ce que nous ayons survolé la Hollande. Ensuite, les avions ont commencé à former ce que j'appellerais un « courant », et plus nous nous rapprochions de la cible, plus le « courant » se resserrait. Nous pouvions voir toutes sortes de tirs de DCA exploser devant nous. Les Pathfinders avaient survolé la cible en premier pour larguer leurs indicateurs de cible qui explosaient à quelques centaines de pieds au-dessus de la cible. Les viseurs de bombes dans chaque appareil utilisaient ces marqueurs comme point de visé, sauf indication contraire du viseur de bombes principal en charge du raid.
À environ 5 minutes de la cible, notre viseur de bombes, Stu, a pris le contrôle, guidant Don de tourner légèrement à gauche ou à droite jusqu'à ce que la cible soit alignée correctement dans le viseur de bombes. À ce moment-là (15h48 ), la cible et les marqueurs étaient masqués par la fumée. Sur les instructions du viseur de bombes principal, Stu a donc lâché ses bombes à la limite de la partie principale de la fumée. Lorsque Stu déclencha le bombardement, deux bombes de 1 000 livres sont restées accrochées, leur mécanisme de déclenchement ayant gelé en altitude. Don a dû maintenir le cap pendant quelques secondes encore pour que la caméra puisse enregistrer les explosions de nos bombes au sol. Une fois satisfait, Don nous a fait faire demi-tour pour rentrer à la maison.
Nous avons trouvé la DCA vraiment effrayante car elle s’élevait et explosait tout autour de nous. Nous n'avons vu aucun avion être touché directement et exploser, mais je suis sûr que beaucoup d'entre eux ont été abîmés mettant en jeu leur retour à la base. (Aucun avion n'a été perdu lors du raid de Jülich.Trois Lancaster ont été perdus lors du raid de Düren, et un Lancaster a été perdu lors du raid de Heinsberg). Nous avons finalement pu larguer les deux bombes accrochées lorsque nous sommes descendus à 12 000 pieds au-dessus de la mer du Nord.
After an exhausting, hours-long operation over enemy territory, aircrew could finally stretch their legs and have a cup of tea or coffee (with or without rum) to help them unwind. Photo: Musée impérial de la guerre
Nous avons atterri à la base à 18h35. Quel soulagement ! Je pouvais enfin sortir de ma tourelle et me dégourdir; je n'avais qu'environ 8 pouces pour bouger mes pieds dans la tourelle. On nous a ramené en bus ou en camion vers le bâtiment de préparation au vol, où nous avons retiré notre équipement. À l’entrée du débriefing individuel de l'équipage, les aumôniers nous ont donné une tasse de soi-disant « café », avec ou sans une bonne dose de rhum de la marine. Ce rhum a bien réussi à calmer les nerfs! Après le débriefing, nous sommes retournés au mess pour manger du bacon et des œufs, puis nous sommes allés nous coucher. Notre première mission était terminée.
Les premières opérations
Deux jours plus tard, le 18 novembre 1944, nous avons repris les opérations avec un autre raid de jour. Cette fois-ci, il s'agissait de Münster, encore une fois près de la vallée de la Ruhr. La routine était à peu près la même que pour le raid sur Jülich. L'attaque primaire a lieu à 15h05, à 18 000 pieds, en utilisant des Gee. Il n'y avait toujours aucun moyen d'éviter la DCA.
Une mission de nuit était prévue pour le 21 novembre. Al m’a accompagné jusqu’au stationnement des avions vers 08h00. Nous avons repris notre routine, comme la manipulation des tourelles d'entraînement. Ensuite, nous avons passé une heure assis dans un théâtre, dans l'obscurité, à nous entraîner à la vision nocturne, en observant les avions ennemis sous différentes conditions d'éclairage. L'après-midi, nous avons approché l'appareil pour nettoyer les canons et polir le plexiglas. Une fois terminé, notre petit déjeuner nous attendait suivi de notre briefing pour la mission. Là, nous avons appris que notre objectif pour la nuit était Castrop-Rauxel. Il s'agissait d'une raffinerie de pétrole, la première d'une longue série.
Nous avons décollé peu avant 16h, passant au-dessus de la Hollande avant d'entrer en Allemagne à environ 18 000 pieds. Soudain, une rafale de DCA éclata juste derrière nous. J'ai prévenu Don et il a dévié de sa trajectoire pendant environ 15 secondes. Nous avons eu beaucoup de chance, car une autre salve éclata juste derrière nous! Nous avons appris plus tard qu'il s'agissait de tirs d'artillerie très précis contrôlés par radar. Lors de plusieurs voyages ultérieurs, nous avons rencontré des tirs de DCA contrôlés par radar qui nous forçaient à modifier notre trajectoire. Mais il fallait faire vite.
Une fois au-dessus de la cible, les énormes flammes et l'épaisse fumée noire des incendies de pétrole s'élevaient à des milliers de pieds. Stu a largué ses bombes sur une concentration d'indicateurs de cibles (T.I.) rouges et verts. Regarder la cible directement compromettait notre vision nocturne, donc j'ai fermé un œil pour observer les dégâts. De toute évidence, la raffinerie n'a plus jamais produit de pétrole après ce raid.
J'ai trouvé ces raids nocturnes bien pires que les raids de jour, car plus de 200 avions survolaient la cible en l'espace d'environ 15 minutes, sans éclairage et échelonnés à différentes altitudes. Il fallait parfois voler à travers les nuages et les collisions étaient fréquentes mais nous avions effectué nos bombardements et sommes rentrés à la base sans encombre.
La raffinerie de pétrole synthétique de Castrop-Rauxel a subi 35 bombardements pendant la guerre et la production a finalement cessé dans la nuit du 31 novembre 1944. Cette photo d'après-guerre montre les dégâts accumulés. Photo via. www.trolley-mission.de/
Notre quatrième mission, dans la nuit du 27 au 28 novembre, concernait la ville de Neuss. Tout s'est bien passé, mais sur le chemin du retour, nous avons appris que le Yorkshire était couvert de brouillard et nous avons dû nous diriger vers la base de l'USAAF à Wendling dans le Norfolk. Aucun souci de notre part car leur nourriture était meilleure que la nôtre.
Notre cinquième mission, dans la nuit du 6 au 7 décembre, ciblait Osnabrück, une grande ville de Basse-Saxe, dans le nord-ouest de l'Allemagne, ce qui représentait une distance importante pour nous, puisqu'il nous fallait un peu plus de 7 heures pour y arriver. Pour les longs trajets comme celui-ci, nous devions installer des réservoirs de carburant supplémentaires accrochés sous l'aile au lieu de deux bombes de 500 livres. Il y avait beaucoup de DCA et nous avons vu quelques avions touchés. (7 Halifax et 1 Lancaster ont été perdus au cours du raid.) Lorsque le moment est venu de bombarder, nous n'avons pas vu de T.I., seulement la lueur du feu sous les nuages, et nous avons donc décidé d'abandonner la mission. Nos deux bombes de 1 000 livres ont été larguées au-dessus de la mer du Nord et nous sommes revenus avec le reste de notre chargement soit 1 080 bombes incendiaires de 4 livres.
Notre sixième mission, dans la nuit du 17 au 18 décembre 1944, ciblait Duisberg, en plein centre de la vallée de la Ruhr. Il y avait certainement beaucoup de DCA à l'aller et au retour. Il s'agissait d'un raid sur des entrepôts industriels. Je crois que nous nous sommes bien débrouillés sur cet objectif. Sur le chemin du retour, nous avons de nouveau été déroutés à cause du brouillard pour enfin atterrir à RAF Strubby, dans le Lincolnshire.
Le 26 décembre 1944, nous avons effectué un raid de jour à Saint-Vith, un petit village belge important pour ses jonctions d'autoroutes et de voies ferrées. La météo s'était enfin améliorée, ce qui a permis au Bomber Command d'intervenir dans l'offensive terrestre allemande connue sous le nom de « la bataille des Ardennes ». C'est la première fois que nous avons pu appuyer les Américains au sol. Cela faisait une semaine que nous essayions de les aider, mais un épais brouillard au-dessus de l'Angleterre et du continent ne le permettait pas. C'est également au cours de cette semaine que nous avons reçu environ 8 pouces de neige mouillée et épaisse à Leeming. Le commandant a fait distribuer des pelles de jardin à tous les membres de la base, quel que soit leur grade ou leur métier. Chacun s’est vu allouer une grande surface à déblayer. Après une longue journée de déblayage, il a encore neigé au cours de la nuit. (Les opérations ont été initiées et annulées dix fois au cours du mois pour raison de mauvais temps).
À l’aide de son carnet de bord, Ron Moyes a retracé toutes les missions de son équipage depuis RAF Leeming avec le 429e escadron et depuis RAF Grandson Lodge avec le 405e escadron. Map via Moyes Family Collection
Quoi qu'il en soit, nous avons finalement réussi à décoller (près de 300 avions provenant de tous les groupes de bombardiers) pour attaquer les positions des troupes allemandes près de St. Vith. La DCA était intense et une rafale a mis hors de service notre moteur extérieur tribord, il ne nous restait plus que de trois moteurs. Sur le chemin du retour, nous avons découvert que nous avions encore deux bombes de 500 livres sous notre aile bâbord. Nous avons essayé de les larguer au-dessus de la Manche, mais sans succès.
Notre base étant à nouveau plongée dans le brouillard, nous avons été détournés vers Kinloss, dans le nord de l'Écosse. Avec seulement trois moteurs, nous étions les derniers d'une longue liste d'avions à arriver. Alors que Don alignait l'avion en approche finale vers la piste, une grosse rafale de vent venant de tribord a fait basculer l’appareil sur bâbord au moment où nos roues touchaient le sol. Don a crié « Tenez bon ! ». Une série d'avions stationnés et de bus remplis d'équipages, sont apparus devant notre nouvelle trajectoire. Personne n‘avait oublié le fait que nous avions encore 2 bombes accrochées sous l’aile à babord. Don a tiré sur le manche et nous avons réussi à frôler ces avions et ces bus. Tout ce que je peux dire, c'est que nous avons eu de la chance d'avoir un avion neuf. Mais ce n’était pas encore fini ! De là, nous allions tout droit vers la tour de contrôle. Une fois de plus, Don a crié « Tenez bon ! » et il a mis l'avion debout sur le bout de l'aile, et nous avons évité le désastre ! Trois d'entre nous sont retournés à Leeming le lendemain, tandis que le reste de l'équipage a attendu que le moteur soit remplacé avant de rentrer à notre base le jour suivant.
Le 28 décembre 1944, nous avons effectué une mission de nuit vers Opladen, juste à l'est de la vallée de la Ruhr. Il s'agissait d'une autre cible industrielle. Nous venions de décharger nos bombes et nous nous dirigions vers notre base lorsque nous avons réussi à éviter de justesse un bimoteur ennemi. Peu après, Al et moi avons tous deux repéré un chasseur allemand Focke-Wulf Fw.190 à environ 2000 pieds à l'arrière; c'était vers 04h30. Le Fw.190 a commencé à larguer des fusées éclairantes sous parachutes sur notre trajectoire de vol. L’astuce des Allemands consistait à nous éclairer et dévoiler notre silhouette pour qu’un autre chasseur puisse nous attaquer par l'avant. Nous avons compris le jeu de l’ennemi et nous avons averti Don de surveiller l'avant.
Comme de fait, Don a repéré un chasseur venant de l'avant et a immédiatement fait basculer notre appareil en manœuvres de tire-bouchon. Le chasseur est passé en dessous de nous, sans réussir à nous toucher. Ni Al ni moi ne pouvions le voir en raison des manœuvres du pilote. Nous avons continué cette procédure pendant au moins une demi-heure, entrant et sortant des nuages. L'aube approchait, tout comme la côte, lorsque les deux chasseurs allemands ont finalement abandonné, Dieu merci.
Jardinage et autres opérations
Nous avons appris dans l'après-midi que notre premier voyage de largage de mines était prévu pour le 29 décembre 1944. En fait, il s'agissait de « Jardinage », le nom de code pour ce genre d'opérations. Notre objectif était le fjord d'Oslo, en Norvège. Nous avions rejoint la section à 08h00, pour apprendre que nous étions en mission cette nuit-là. Pas de temps de nous reposer; juste le temps de prendre notre repas opérationnel et d'assister au briefing.
Lors des missions de longue durée, Moyes et son équipage recevaient des amphétamines pour les maintenir alertes et éveillés.L'utilisation d'amphétamines était courante au sein du Bomber and Coastal Command de la RAF lorsque les hommes devaient rester éveillés et vigilants lors d'opérations de longue durée.Ce sachet de quatre pilules faisait partie de la trousse de survie de chaque équipage d'avion.. Photo: Musée impérial de la guerre
Seuls trois avions de l'escadron 429 étaient prévus pour ce voyage. Notre soute comprenait quatre mines de 1 500 livres; chaque mine était munie d'un parachute à l'extrémité de la queue pour l'aider à pénétrer dans l'eau. Les détonateurs pouvaient être programmés de manière à ce que 6, 8 ou 10 navires puissent passer en sécurité avant qu'ils n'explosent. D’après notre briefing, nous devions rester à une hauteur inférieure à 2 000 pieds pour éviter le balayage des radars allemands. De plus, lors du briefing, on nous a donné à chacun deux petites pilules pour nous aider à rester éveillés, car nous étions debout depuis le début de la matinée.
Le ciel était clair et la lune presque pleine, ce qui a facilité la lecture de la carte lorsque nous sommes arrivés en Norvège. Nous avons remonté le fjord qui mène à Oslo avant de faire demi-tour et descendre à 800 pieds d'altitude. C'est alors qu'Al et moi avons aperçu une voiture circulant sur une route avec ses phares allumés. Pensant que seuls les Allemands feraient cela, nous avons demandé à Don si nous pouvions ouvrir le feu, et il a répondu « O.K. ». Nous avons tiré et les feux se sont rapidement éteints. Nous avons continué à poser nos quatre mines, l'une après l'autre, puis nous sommes rentrés à la maison. Accablés par la fatigue, nous sommes rentrés à la base vers 23h.
Deux nuits plus tard, nous avons été désignés pour retourner à Oslo; c'était la veille du Nouvel An 1945. Nous avions été informés que nous devions emprunter le même itinéraire que celui du voyage précédent. Cette fois-ci, c'était un peu différent pour nous, car nos mines étaient équipées de détonateurs spéciaux et nous devions les larguer plus près du rivage, dans des eaux relativement peu profondes. La RAF souhaitait que les Allemands récupèrent ces mines, étudient les détonateurs et mettent au point une méthode pour balayer ces mines. Bien entendu, tout ce qu'ils feraient serait totalement inutile en raison des détonateurs modifiés qui avaient été installés.
Une fois de plus, la lune était pleine et il n'y avait pas de nuages. Après avoir fait demi-tour dans le fjord, nous sommes descendus à 800 pieds. Stu a largué les mines conformément aux instructions. Tout d’un coup, un enfer s'est déchaîné dans un ciel criblé de balles traçantes. Apparemment, il y avait quelques bateaux ou barges chargés de canons de 30 ou 40 mm. Don a immédiatement mis l'avion en piqué. Al et moi avons bien sûr ouvert le feu sur les vaisseaux. Nous n'avions que nos mitrailleuses .303, mais chaque canon tirait à une cadence de 1150 coups par minute et nous avions 6 canons. Quoi qu'il en soit, nous n'avons pas lâché la gâchette. Mes armes étaient chauffées à blanc lorsque Stu, notre viseur de bombes, a appelé : « Commandant, tirez sur le manche ! Je ne sais pas nager. » Nous n'étions plus qu'à 75 pieds au-dessus de l'eau quand Don a redressé l’appareil. Un seul de leurs tirs nous avait touchés sans faire beaucoup de dégâts; je crois que Red a gardé le fragment. Nous n'avons jamais su si les Allemands avaient cessé de tirer à cause de nos tirs de riposte ou parce que nous étions trop bas pour leurs canons. Il était presque minuit lorsque nous sommes rentrés. Une fois que notre débriefing était terminé et que nous avions mangé une bouchée, il faisait presque jour. Épuisés et au lit, nous avons passé tout droit et manqué le repas de dinde du Nouvel An.
Gros plan de la tourelle d'armement de queue Boulton Paul Type 'E', montant quatre mitrailleuses .303, sur un Handley Page Halifax. Les douilles étaient éjectées par les deux orifices rectangulaires situés à l'arrière de la tourelle. Photo: Musée impérial de la guerre
Dans la nuit du 2 janvier 1945, nous étions de nouveau en mission, cette fois vers Ludwigshafen; les points de visée étaient deux usines chimiques de l'IG Farben très bien défendu par des canons antiaériens. Nous avons vu plusieurs avions touchés. Juste après avoir largué nos bombes, des projecteurs sont venus se braquer sur nous, mais Don a basculé l’appareil en un virage serré en tire-bouchon, et nous avons pu nous en débarrasser. Ce fut un autre long voyage de près de 8 heures, et nous avons bien apprécié le grand verre de rhum qu'ils ont versé dans notre thé et notre café avant que nous n'entrions pour notre débriefing; cela a vraiment calmé nos nerfs.
Le mauvais temps continua en janvier 1945 et tous les équipages furent à nouveau mis à pied d'œuvre à déneiger les pistes pendant la journée. [L'ORB du 429 indique : « La nouveauté du déneigement a commencé à disparaître et les garçons ont subi quelques muscles endoloris. Cependant, du café a été servi après leurs efforts et a compensé dans une certaine mesure leur dos fatigué. » 10 janvier 1945] Nous avons mérité une semaine de congé en janvier. Après cinq semaines de service, sept jours par semaine, nous avons mérité une semaine de congé.
Nous avons poursuivi notre entraînement en vol et au sol pendant le reste du mois de janvier 1945. C'est au cours de cette accalmie dans le tempo des opérations que Don a entamé une « discussion » avec l'officier mécanicien de l'escadron : « Si on met les quatre moteurs en drapeau en vol, peut-on les redémarrer ? Don pensait que c'était possible. Les moteurs Hercules du Halifax nécessitent une batterie branchée sur le moteur intérieur droit pour démarrer au sol. Les rares fois où nous avons été déroutés vers d'autres bases, telles que celles de l'USAAF, je grimpais sur les épaules de Don et je faisais tourner une manivelle pour démarrer le moteur, comme sur une Ford Model T.
Nous étions à environ 10 000 pieds d'altitude lors d'un vol d'entraînement lorsque Don a décidé de prouver qu'il pouvait redémarrer les moteurs en vol. Mais, par mesure de précaution, il nous a demandé de mettre nos parachutes et de nous tenir prêts près des trappes d'évacuation. Il y avait cependant un problème: avec les quatre moteurs éteints, Red, notre opérateur radio, devait remplacer un fusible dans le boîtier à fusibles situé à son poste.Don a mis le n° 1 en drapeau, puis le n° 2, puis le n° 3 et enfin le n° 4. Nous tombions comme « une tonne de briques », comme on dit, tandis que Don demandait à Red de remplacer le fusible. Ce qu'ils ignoraient tous les deux, c'est que le cordon de l'interphone de Red s'était déconnecté lorsqu'il s'était déplacé vers la trappe d'évacuation avant.Finalement, Fergy a attrapé le cordon de l'interphone de Red pour lui montrer qu'il était débranché. Red l'a rebranché et a remplacé le fusible. Don a alors pu redémarrer les moteurs et gagner son pari – point de discussion.
Au cours de l'hiver 1944-1945, des Liberator de l'US Army Air Corps appartenant au 785th Bombardment Squadron sont stationnés à la base RAF Leeming. L'unité était basée à la station de la RAF Attlebridge dans le Norfolk. Elle était peut-être en attente là-bas pour une mission pendant la bataille des Ardennes.. Photo: Ron Moyes
Un jour, nous avions 24 heures de relâche et l'équipage a décidé de faire la tournée des pubs dans la ville de Harrogate, au sud de York. Le lendemain, nous étions en voyage d'entraînement et avons survolé Harrogate. L'un des membres de l'équipage a demandé à Don de descendre plus bas car il voulait nous montrer où il avait raccompagné une fille chez elle. Nous n'avons pas réussi à localiser l'endroit, mais Don a repéré un match de football qui se jouait sur le terrain du village et a décidé de les survoler. Nous étions si bas que les joueurs se sont dispersés. Alors que nous approchions de la base, Don a reçu un message radio lui demandant de se présenter à la tour de contrôle après l'atterrissage. Il s'est exécuté et le commandant de l'escadron l'attendait. Apparemment, c'était l'équipe du quartier général de l'ARC qui jouait au football et ils avaient perçu notre lettre d'immatriculation! Don a reçu une réprimande ou quelque chose du genre, écrite à l'encre rouge dans son carnet de vol pour avoir volé trop bas. Nous étions « cuits », comme on dit. Nous avons été rondement critiqués, alors nous avons tous décidé qu'il valait mieux quitter cet escadron. Nous avons décidé de tenter notre chance avec la Pathfinder Force (PFF) dont le rôle était beaucoup plus dangereux que celui du 429e escadron.
Nous avons repris nos opérations le 1er février 1945. Cette fois, nous devions nous rendre dans la ville de Mayence, pour attaquer une usine industrielle. Le voyage a duré un peu plus de 7 heures. Une fois de plus, il y avait beaucoup de tirs antiaériens et de projecteurs, mais nous nous en sommes sortis indemnes.
La nuit suivante, nous nous sommes dirigés vers la ville de Wanne-Eickel. Une fois de plus, la cible était une raffinerie de pétrole dans la vallée de la Ruhr, qui était toujours un point chaud bien défendu avec des tirs antiaériens et des projecteurs dans toute la zone. Encore une fois, nous nous en sommes sortis sains et saufs.
Le 4 février 1945, nous faisions partie des six avions du 429e escadron chargés d'une mission de minage dans le port allemand de Wilhelmshaven, où les Allemands accostaient leurs principaux navires de guerre et leurs sous-marins. Nous avons survolé la mer du Nord juste au-dessus des vagues, puis, à la dernière minute, nous avons grimpé pour atteindre environ 15 000 pieds afin de larguer nos mines. Il y avait une DCA soutenue, des projecteurs et des chasseurs. Notre avion a été touché par des tirs antiaériens; on aurait dit que quelqu'un jetait des pierres sur l'avion. Tout semblait fonctionner correctement, mais nous ne savions pas si le train d'atterrissage était intact. Nous sommes toutefois retournés à la base pour atterrir sans encombre.
Le lendemain matin, nous sommes sortis pour constater les dégâts subis par notre avion. Don a repéré un gros trou qui transperçait carrément le dôme en plexiglass destiné à la navigation. Or, le mécanicien de bord est censé se tenir debout à cet endroit pour surveiller les autres avions; c'est une partie très importante de son travail. Nous étions figés devant cette trouvaille. C'était incroyable. Où était passé le mécanicien de bord? À ce moment-là, Dirk est arrivé. Don lui a demandé: « Où étais-tu quand nous étions au-dessus de la cible ? » Il a répondu : « Debout, j’observais sous le dôme. » Don lui a montré le grand trou. Le morceau d’obus aurait dû lui arracher la tête. Nous avons appris que Dirk avait eu peur et qu'il s'était recroquevillé pour se cacher. Don lui a dit qu'il ne voulait plus de lui dans notre équipage et nous avons tous été d'accord. Ignorer sa responsabilité dans ce cas aurait pu coûter la vie à nous tous.
Notre opération suivante, dans la nuit du 7 février 1945, avait pour cible la ville allemande de Gogh. Pour ce raid, nous avions embarqué un mécanicien de bord expérimenté de la RAF, le lieutenant d’aviation J.W. Carr, décoré de la DFC. Ce raid avait pour but de préparer le terrain pour l'avance de l'armée à travers la frontière allemande près de la forêt de Reichswald. Au-dessus de la cible, le maître bombardier ordonna à la force principale de descendre sous les nuages, à seulement 5 000 pieds. À cette altitude, les bombes qui explosaient devant nous nous secouaient dans tous les sens. Le viseur de bombes principale de la formation a dû annuler le raid avant que nous puissions larguer nos bombes et nous avons ramené notre chargement complet [8 bombes GP de 500 livres et 8 bombes GP de 250 livres]. Une fois de plus, nous nous en sommes sortis sains et saufs.
Le lendemain, notre transfert vers la Pathfinder Force a été confirmé, mais sans mécanicien de bord..
405e Escadron – Formation de la Force Pathfinder et premières opérations
Le 13 février 1945, nous sommes arrivés à la base RAF de Warboys, qui était l'unité de formation à la navigation (NTU) des nouveaux équipages de la Force Pathfinder (PFF). Notre équipage était logé dans une baraque Nissen ou on nous offrait les services d’une jeune fille de la WAAF comme « batwoman » ou domestique. Je ne pense pas qu'elle nous faisait confiance. Chaque matin à 7 heures, elle ouvrait doucement la porte, ne passant que son bras pour allumer la lumière, puis refermait rapidement la porte.
Lorsque Ron Moyes était affecté au 405e Escadron, l'unité était commandée par le Colonel d’aviation William F. M. Newson, DSO, DFC et Bar. Newson a été intronisé au Temple de la renommée de l'aviation canadienne en 1984 après une brillante carrière dans l'ARC.
Nous sommes restés à Warboys pendant deux semaines, le temps de nous habituer à l'Avro Lancaster. L'Avro Lancaster Mk. III, de fabrication britannique, était un bel avion, facile à entretenir et à piloter. Il pouvait transporter une énorme charge de bombes sur de longues distances. Le Handley Page Halifax était équipé de tourelles à commande électrique, tandis que le Lancaster avait des tourelles à commande hydraulique, qui étaient très différentes. La tourelle arrière du Lancaster disposait d’environ 10 000 cartouches, transportées dans des plateaux montés chaque côté du fuselage, la tourelle centrale supérieure en contenait environ 5 000 et la tourelle avant, que le viseur de bombes pouvait utiliser, en contenait environ 2 000. De plus, le plexiglas de nos tourelles arrière avait été retiré pour offrir une meilleure visibilité.
Ron Moyes dans sa tourelle hydraulique Nash & Thompson équipée de quatre mitrailleuses. Le poste du mitrailleur arrière dans le Lancaster était un endroit solitaire. Isolé des six autres membres de l'équipage en poste à l'avant de l'avion, les mitrailleurs arrière comme Ron Moyes avaient une vue impressionnante mais terrifiante sur les destructions causées par chaque raid. La plupart des mitrailleurs retiraient la verrière en perspex pour mieux voir, s'exposant ainsi au froid extrême à 20 000 pieds d'altitude. Photo: Musée impérial de la guerre
Les premiers jours à Warboys étaient occupés par des cours magistraux. Notre chef mitrailleur nous a expliqué comment nous devions procéder si nous étions attaqués par des chasseurs. Compte tenu de notre expérience, nous avions du mal à croire ce qu'il nous disait. Il insistait sur la phrase suivante lorsque nous apercevions un chasseur ennemi sinon notre note en souffrirait: « Tally-ho, Tally-ho. Mitrailleur arrière au pilote, mitrailleur arrière au pilote. Un chasseur approche par tribord [ou bâbord]. Préparez-vous à manœuvrer. Virage en spirale tribord [ou bâbord]. Allez. » Pendant les opérations réelles, tout ce que nous disions était : « Chasseur, virage en spirale tribord [ou bâbord]. » Don effectuait alors la manœuvre d'évitement indiquée, qui consistait en un virage en piqué vers bâbord ou tribord, puis, après 15 secondes, il redressait l'avion pour reprendre notre cap initial. Dans la tourelle arrière, j'étais debout plaqué au sommet de la tourelle, les yeux rivés vers le ciel, puis, au moment où l'avion redescendait, c'était l'inverse et j'étais plaqué contre mon siège. Don manoeuvrait en tire-bouchon qui, je crois, nous a sauvé la vie à plusieurs reprises.
Au cours de notre séjour à la NTU, nous avons effectué plusieurs vols de longue durée. Ils avaient également prévu des chasseurs – les nôtres – pour nous attaquer. Nous étions dotés d’un appareil photo tenant lieu de munitions avec une pellicule qui enregistrait notre réaction face aux chasseurs qui nous attaquaient.
L'équipe Walkley après avoir été affectée au 405e Escadron Pathfinders à bord d'un Lancaster. De gauche à droite : Kuhn, Moyes, Redinger, Ferguson, Walkley et Farmer.. Photo: Moyes Family Collection
Nous avons ensuite été affectés au 405e Escadron à Gransden Lodge, à la frontière entre le Bedfordshire et le Cambridgeshire. Les quartiers d'habitation de la base étaient intégrés dans le village de Gransden Lodge. C’était une base de guerre, avec un hangar et un ensemble de baraques Nissen. Une grande différence que nous avons constatée ici était que le commandant de l'escadron était un colonel d’aviation plutôt qu'un lieutenant-colonel d’aviation; les commandants d’escadrille étaient des lieutenant-colonels d’aviation plutôt que des chefs d'escadron; et les chefs de section étaient des lieutenant-colonels d’aviation plutôt que des commandants d’aviation. La plupart des équipages avaient déjà effectué leur quota de missions; certains avaient effectué 45, 60 voire davantage de missions. Nous avions beaucoup d'Australiens parmi nous, une bonne bande de gars.
Nous avions effectué trois vols d'entraînement autour de l'Angleterre avant de partir pour notre première mission. En 1945, le PFF était organisé de telle manière que, pendant les quatre ou cinq premières opérations, un équipage jouait le rôle de soutien, entrant sur la cible à peu près en même temps que le bombardier principal, environ une minute ou deux avant « l'heure H » (début officiel du raid). Nous transportions également des liasses de paillettes c’est-à-dire des bandes métalliques d'environ 18 pouces par un demi pouce, emballées dans du papier. Celles-ci étaient lancées par une trappe à l'avant de l'avion aussi vite que possible. Lorsqu'elles entraient en contact avec le flux d'air, elles se dispersaient, créant des milliers de petites cibles aveuglant ainsi le radar au sol.
Emplacement du radôme H2S sur le Lancaster. Le H2S était le premier système radar aéroporté capable de balayer le sol. Il a été développé pour le Bomber Command de la Royal Air Force pendant la Seconde Guerre mondiale afin d'identifier les cibles au sol pour les bombardements de nuit par tous les temps. Ce système a permis de mener des attaques au delà de la portée des différentes aides à la navigation radio telles que Gee ou Oboe, qui étaient limitées à environ 220 miles de distance depuis différentes stations au sol. Il a également été largement utilisé comme système de navigation général, permettant d'identifier des points de repère à longue distance.
Une fois notre rôle de soutien terminé, vous étiez choisi pour faire partie soit de l'équipe de bombardement à l'aveugle, soit de l'équipe de bombardement visuel, en fonction, je crois, des résultats obtenus en tant que soutien. Si vous étiez sélectionné pour l'équipe de bombardement visuel, cela signifiait que vous deviez intervenir dès le début du raid pour larguer vos fusées éclairantes ou vos fusées de marquage. Les équipages de bombardement à l'aveugle arrivaient quelques minutes plus tard, juste pour continuer à marquer la cible tout au long du raid. Les équipages de bombardement visuel transportaient un bombardier supplémentaire; un viseur de bombes identifiait la cible à l'aide d'un radar H2S, l'autre viseur de bombes identifiait la cible visuellement et larguait les bombes. Les deux travaillaient ensemble pour plus de précision.
Même si nous jouions tous les joyeux larrons en foire et ignorions les grades au sol, une transformation totale s'opérait lorsque nous montions dans l'avion pour une mission. Don n'a jamais eu à faire valoir son grade ou à préciser « C'est un ordre » quand il nous donnait des directives. Tout le monde avait trop de bon sens et d'autodiscipline pour avoir besoin de telles absurdités dans les airs. Il n'y avait ni salut ni « Monsieur », mais une métamorphose s'opérait dès que nous montions dans l'avion. Nous n'étions plus de jeunes hommes qui s'amusaient, mais des hommes dotés d’une mission sérieuse à accomplir, des hommes qui s'attelaient à leurs différentes tâches avec discipline car nos vies en dépendaient.
La salle des opérations et de planification du 405e escadron Pathfinder à la base RAF Gransden Lodge, à environ 10 miles à l'ouest de Cambridge, en Angleterre. Dans cette salle animée et enfumée, les missions étaient planifiées dans les moindres détails, en tenant compte de toutes les variables telles que le carburant, les signaux quotidiens, la météorologie, les renseignements, les défenses allemandes et les temps d’amorçage des bombes. Après la planification, l'escadron se réunissait pour un briefing avant d'être conduit aux avions. Photo: RCAF
Notre première opération PFF était prévue pour Chemnitz, dans l'est de l'Allemagne, près de la frontière tchèque, dans la nuit du 5 mars 1945 (Lancaster Mk. III, PB653, « V »). Chemnitz avait été bombardée par l'USAAF dans un raid de jour, nous l'avions bombardée cette nuit-là, puis l'USAAF l'a bombardée à nouveau le lendemain; comme Dresde, cette opération s'inscrivait dans le cadre de l'opération Thunderclap, destinée à aider l'avance russe. Lors du briefing, on nous a remis un petit Union Jack en carton avec une ficelle pour l'attacher autour du cou. Si nous étions contraints de sauter en parachute dans la zone cible, nous devions marcher vers l'est pour rejoindre l'armée russe. J'ai lu par après que des membres d'équipage suivant cette directive ont été faits prisonniers par les Russes et traités horriblement!
Pour ce premier vol, notre mécanicien de bord était un Capitaine d’aviation de la RAF , V.G. Hope, DFC. En tant qu'équipage de soutien, nous transportions trois bombes de 2 000 livres, plus trois bombes de 500 livres. Une fois de plus, il y avait beaucoup de tirs antiaériens. La ville était couverte de nuages, nous avons donc utilisé le H2S mais on nous a dit que le raid n'avait pas été très fructueux. C’était frustrant car pour nous le voyage jusqu'à Chemnitz avait duré 7 heures et demie.
Le 11 mars 1945, nous étions de nouveau en mission (Lancaster Mk. III, PB282, « Y »), cette fois-ci vers Essen, la deuxième plus grande ville industrielle de la Ruhr. Nous étions encore une fois en rôle de soutien. Notre mécanicien de bord était le Sous-lieutenant d’aviation A.W. Bishop, de l’ARC. Il s'agissait d'un raid de jour auquel participaient 1 079 avions, le plus grand nombre d'appareils du Bomber Command de la RAF jamais lancé sur une seule cible. Nous sommes arrivés tôt et avons dû la survoler en attendant les premières bouffées de fumée bleue qui marqueraient le point de visée. Notre chargement de bombes comprenait une bombe « cookie » de 4 000 livres, six bombes de 1 000 livres et trois bombes de 500 livres. Alors que nous atteignions la Manche lors de notre retour, il y avait encore des avions qui continuaient à se diriger vers la cible.
Nous faisions partie des six avions (Lancaster Mk. III, NG437, « M ») du 405e escadron chargés d'une mission nocturne le 13 mars 1945 vers Erin, une usine de benzène synthétique dans la Ruhr. Une fois de plus, nous avons joué le rôle d'équipage de soutien, et notre mécanicien de bord était à nouveau le Capitaine d’aviation Hope. La zone cible était très nuageuse et nous avons largué nos bombes à 18 000 pieds à l'aide du système Gee. La défense antiaérienne était faible.
Seize avions du 405e escadron ont participé à une mission nocturne le 15 mars 1945 à Misburg, dans la banlieue de Hanovre, une autre usine de benzène. Nous avions été choisis comme équipage d'éclairage visuel pour ce voyage (Lancaster Mk. III, PB282, « Y »). Notre mécanicien de bord était le Sergent de section A.J. Newman, de la RAF, et nous avions désormais un viseur de bombe supplémentaire. Stu, notre viseur de bombes habituel, était chargé du radar H2S, tandis que notre nouveau coéquipier, le Sous-lieu
tenant d’aviation W.H. « Bill » Horsman, de la RAF, devait larguer les fusées éclairantes et pour bombarder la cible à vue. Pour ce raid, nous transportions dix fusées éclairantes qui éclateraient juste au-dessus de la cible, éclairant le sol pour permettre aux autres avions PFF d'identifier la cible. Après avoir largué nos fusées éclairantes, nous avons effectué une orbite autour de la cible, puis largué nos trois bombes de 1 000 livres. Deux explosions importantes accompagnées d'un nuage de fumée noire ont été observées, la seconde illuminant le cockpit de notre avion à 15 000 pieds. Deux Lancaster du 405e escadron avaient disparu
La fin en vue
Dans la nuit du 16 au 17 mars 1945, nous étions l'un des 14 appareils Lancaster Mk. III, ME370, « X ») du 405e escadron formant d'une force de près de 300 avions chargés de bombarder Nuremberg. C'était la même ville qui avait coûté 95 avions au RAF Bomber Command les 30 et 31 mars 1944. Nous étions donc un peu inquiets pour cette mission.
Le vol devait durer près de 7 heures et nous avons rencontré la première salve de tirs antiaériens guidés par radar lorsque nous avons traversé la frontière entre les Pays-Bas et l'Allemagne. Juste derrière nous, à notre altitude, il y a eu une rafale de tirs antiaériens. Al et moi avons immédiatement prévenu Don, qui a viré de 45 degrés vers bâbord en urgence. Au moment où nous avons quitté la trajectoire, une autre salve a éclaté exactement là où nous aurions dû nous trouver. À l'approche de Nuremberg, nous avons pu observer une autre concentration importante de tirs antiaériens devant nous. Notre mission consistait de nouveau à servir d'éclaireurs visuels une minute ou deux avant le début du raid. Au début de nos deux passes de bombardement (nos fusées éclairantes ont été larguées à 18 000 pieds à 21h26 et nos trois bombes de 1 000 livres ont été larguées à 21h32), la DCA était terrible et les Allemands lançaient de grandes fusées éclairantes qui éclataient dans le ciel. Nous avons également vu des avions touchés, certains anéantis. Les avions semblaient tomber à droite et à gauche. Je peux vous dire que j'ai prié de toutes mes forces pour que nous nous en sortions. J'imagine que le reste de l'équipage a fait de même. Vingt-quatre avions ont été perdus lors de ce raid.
Un junkers JU 88 descend un Lancaster en utilisant le système Schräge Musik de tire vers la haut. Illustration Piotr Forkasiewicz
Lors du débriefing, nous avons rapporté ce que nous avions vu, et on nous a répondu qu’il ne s’agissait que des « épouvantails » c’est-à-dire des obus remplis de chiffons imbibés d'huile pour donner l'impression de détruire un avion avec un coup direct. On nous a dit qu'il s'agissait d'une ruse psychologique des Allemands pour nous démoraliser. Les explosions provoquées par ces « épouvantails » ressemblaient étrangement à des Lancaster ou des Halifax chargés de bombes, de marqueurs de cible (T.I.) ou d'incendiaires explosant en plein vol. Depuis, j'ai appris que les Allemands ne disposaient pas de tels dispositifs et que ce que nous avions vu était bel et bien des avions anéantis par l'impact d'un tir direct sur leur soute à bombes. [Éditeur : Ce que les équipages ont probablement vu était l'effet d'une autre arme allemande, la « schräge musik ». Les Allemands avaient monté deux canons MG 151 pour tirer presque verticalement vers le haut et légèrement vers l'avant depuis le fuselage de leurs chasseurs de nuit Me.110 et Ju.88. En tirant à bout portant sur le ventre non protégé d'un bombardier lourd britannique lourdement chargé, ils provoquaient une explosion en plein vol et une traînée de feu jusqu'au sol.]
Il a fallu attendre dix jours avant que notre équipage reprenne ses opérations. Il était temps de prendre un peu de repos et de s'entraîner. Pendant notre séjour au 405e escadron, l'entraînement était beaucoup plus intensif et concentré que nous avions connu dans un escadron de bombardiers ordinaire. La plupart de nos équipages avaient effectué entre 40 et 80 missions, certains plus de 100. Comme nous, plusieurs équipages avaient eu des problèmes dans leur escadron d'origine pour avoir été un peu indisciplinés. C'est peut-être ce qui leur a permis de traverser toutes ces épreuves ?
Pendant notre temps libre, nous allions au Six Bells Pub. C'était le pub fréquenté par les sous-officiers supérieurs et les aviateurs, ainsi que par les WAAF et les filles de la Land Army qui travaillaient dans les fermes voisines. Les officiers fréquentaient souvent le Crown and Cushion Pub, un peu plus loin dans la rue. Je ne pense pas qu'ils s'amusaient autant que nous. Dans notre pub, quelqu'un se mettait souvent au piano et nous chantions tous en chœur.
Nous sommes retournés à l'Ops avec un raid de jour sur Paderborn (Lancaster Mk. III, PB282, « Y ») en soutien à l'armée américaine le 27 mars 1945. Nous étions à nouveau en soutien, mais notre équipage était toujours composé de huit hommes. Le ciel était couvert à 10/10 (solide), mais il n'y avait ni tir antiaérien ni chasseurs. Notre H2S est tombé en panne et, sur instruction du viseur de bombes principal, nous avons largué nos bombes sur deux bouffées de fumée verte à 16 000 pieds.
Nous avions désormais un mécanicien de bord attitré dans notre équipage, le Lieutenant d’aviation Officer T.H. « Ted » Skebo, DFM, qui en était à sa deuxième mission.` Ted avait reçu la Distinguished Flying Medal alors qu'il volait en tant que sergent au 408e escadron en 1943. Lors des briefings, je m'occupais toujours des rations à distribuer à l'équipage pendant le vol. Ces rations se composaient de six tablettes de chocolat Mars et de chocolat non sucré, ainsi que d'une poignée de bonbons très sucrés. Avec huit membres dans l'équipage, je devais tenir compte de la distribution des tablettes de chocolat Mars pour que tout le monde soit content. Le compte de ces rations remontaient probablement à l'époque des bombardiers bimoteurs qui comptaient seulement six membres d'équipage. La RAF mettait beaucoup de temps à changer les choses.
Le 3 avril 1945, nous avons participé à un autre raid de jour (Lancaster Mk. III, PB555, « O »), cette fois-ci sur Nordhausen. La ville comprenait une grande caserne. [Éditeur : Malheureusement, la caserne abritait un grand nombre de prisonniers des camps de concentration et de travailleurs forcés qui travaillaient dans un complexe de tunnels souterrains où étaient fabriquées des munitions allemandes propulsées par fusées.] Il y avait une couverture nuageuse totale à 10 000 pieds au-dessus de la ville, nous avons dû donc bombardé à l'aide du H2S. Il était difficile d'obtenir un retour précis du H2S, nous avons donc effectué quatre orbites autour de la cible, avant de finalement lâcher nos bombes lors de la cinquième.
La nuit suivante, le 4 avril 1945, nous étions en mission vers Merseberg, la plus grande usine d'huile synthétique du Reich. Il s'agissait d'un voyage de 7 heures et, une fois de plus, nous étions affectés à l'éclairage visuel (Lancaster Mk. III, PB681, « M »). Trois des quatre marqueurs aveugles ont largué des marqueurs aériens, mais aucun des sept illuminateurs du 405e escadron n'a largué ses fusées éclairantes; deux ont bombardé à l’aide du H2S, deux sur des marqueurs aériens, un sur la lueur des incendies visibles à travers les nuages et un sur des marqueurs rouges. Nous avons dû revenir avec nos fusées éclairantes, mais avions largué nos trois bombes de 1 000 livres sur les marqueurs aériens. Deux grosses explosions ont été observées. Il y avait beaucoup de chasseurs et un orage de balles traceuses, mais personne ne nous a attaqués.
Les 8 et 9 avril 1945, nous avons effectué un vol de nuit vers Hambourg, toujours en tant qu'éclaireurs visuels (Lancaster Mk. III, PB282, « Y »). La DCA n'était pas trop forte. Le viseur de bombes principal nous a dit de ne pas larguer nos fusées éclairantes, car elles n'étaient pas nécessaires. Nous avons largué nos quatre bombes de 1 000 livres à 17 000 pieds. Deux nuits plus tard, les 10 et 11 avril 1945, nous avons participé à un raid nocturne sur Plauen, un centre ferroviaire. Lors de ce voyage, nous étions en soutien visuel (Lancaster Mk. III, PB653, « V »). Nous transportions six bombes de 1 000 livres, plus les indicateurs de cible.
Les 16 et 17 avril 1945, nous avons participé à un raid nocturne sur Schwandorf, un autre centre ferroviaire, toujours en soutien visuel (Lancaster Mk. III, ME445, « U »). Le ciel était dégagé et la visibilité très bonne. Les points de visée – le coude de la rivière, le pont qui enjambait la rivière et les bois juste au sud-est de la gare de triage – étaient tous clairement identifiés. Nous avons largué nos indicateurs de cible à 8 000 pieds.
Le 22 avril 1945, nous avons participé à une vague du Bomber Command composée de 767 bombardiers lourds chargés d'un raid de jour contre la ville allemande de Brême. Ce raid s'inscrivait dans le cadre de la préparation de l'attaque du XXXe Corps de l'armée britannique. Nous devions à nouveau servir dans le rôle de soutien visuel (Lancaster Mk. III, PB282, « Y »). Don emmena l'un de nos mécaniciens d'entretien au sol avec lui pour ce raid; le sergent avait toujours voulu voir les résultats d'un raid. Bien sûr, cela était interdit, mais cela n'avait aucune importance pour Don. Finalement, le bombardement a été annulé alors que nous étions juste au-dessus de la cible, en raison d'un épais nuage et d'une fumée dense. Nous avons largué nos bombes dans la mer du Nord.
Nous avons été réveillés à 4 heures du matin le 25 avril 1945 pour un raid de jour sur la maison de campagne d'Hitler près de la ville de Berchtesgaden, dans les Alpes bavaroises. Au sommet de la montagne se trouvait le célèbre «Nid d'Aigle». Le site comprenait également les maisons où logeaient des hauts dignitaires nazis, dont Hermann Göring, ainsi qu'une grande caserne SS. En tant que redoute nationale, cette cible devait être défendu jusqu'au dernier homme. La troisième armée américaine de Patton approchait et voulait que ces troupes allemandes quittent les lieux. Cela signifiait un aller-retour de 2 250 km pour nous, mais l'occasion d'éliminer Hitler était trop belle pour la laisser passer.
Le décollage eut lieu peu après 6 heures et nous fûmes à nouveau confiés le rôle de soutien visuel (Lancaster Mk. III, PB282, « Y »). Il n'y avait que 9 avions du 405e escadron; le viseur de bombes principal et le reste du PFF provenaient du 635e escadron. Plus de 350 bombardiers lourds participaient à ce raid, dont 16 Lancaster du 617e escadron (les « Dambusters ») et 17 Lancaster du 9e escadron transportant des bombes Tallboy de 12 000 livres. Plus de 200 Mustang P-51 de l'USAAF et de la RAF nous escortaient.
En survolant les Alpes, nous avons pensé que c'était le plus beau voyage que nous ayons jamais fait. Nous avions descendu vers le lac de Constance, avant de virer vers l'Est. Nous étions les premiers arrivés, suivi peu après par le reste du 405e escadron. Sans signal du viseur de bombes principal nous ne pouvions donc pas larguer nos indicateurs de cible avant son arrivée. Finalement, nous avons entendu le viseur de bombes principal dire à la radio qu'il ne trouvait pas la cible. La cible principale était une grande caserne militaire. Nous arrivions par l'ouest, la cible se trouvait au nord, à mi-hauteur de la montagne clairement visible. Nous avons alors vu la force principale approcher par le sud. Venant de cette direction, ils ne verraient la cible que lorsqu'ils seraient presque au-dessus, et ils se rapprochaient rapidement. Tous les avions du 405e escadron tournaient autour de la cible lorsque Don a communiqué avec le viseur de bombes principal par radio pour lui dire que nous étions en position pour larguer nos indicateurs de cible au même moment qu’il l’a vue, mais il était trop loin de la force principale qui arrivait. Il donna son feu vert à Don. Nous avons donc largué nos marqueurs et nos bombes, pour ensuite orbiter la cible. Nous observions les escadrons 617 et 9 larguer leurs bombes de 12 000 livres, avant que la fumée et la poussière obscurcirent alors la zone.
Lorsque nous sommes revenus à Gransden Lodge peu après midi, on nous a dit qu'Hitler n'y était pas là. Il se trouvait dans les ruines de sa chancellerie à Berlin, où il s'est suicidé le 30 avril 1945. Ce raid marquait alors notre dernière opération offensive de la guerre.
De retour à la maison
Les citoyens néerlandais affamés applaudissent lorsqu'un Avro Lancaster largue son chargement de vivres près d'Ypenburg, au nord de Rotterdam. Les missions se déroulèrent pratiquement sans encombre. En gros, les Allemands ont tenu leur parole de ne pas tirer sur les avions, et d'innombrables civils néerlandais bénéficient de cette « manne tombée du ciel ». En une semaine, les efforts combinés de la RAF, de la RCAF, de la RAAF, de la RNZAF et de l'USAAC (ils appelèrent cette opération « Chowhound ») permirent de larguer plus de 10 000 tonnes de vivres aux Néerlandais affamés mais toujours reconnaissants. Parmi ceux qui survivent à « l'hiver de la faim » et bénéficièrent de ces vols figurait la petite-fille mal nourrie de l'ancien maire d'Arnhem, une adolescente nommée Audrey Hepburn.Photo: via nationalww2museum.org
Le travail du 405e escadron en tant que Pathfinders n'était pas tout à fait terminé. Le 7 mai 1945, nous avons participé à l'opération « Manna ». La population de l'ouest des Pays-Bas était menacée de famine car cette partie du pays toujours aux mains des Allemands. Cependant, une trêve avait été conclue avec le commandant allemand local et des Lancasters ont eu comme mission de larguer des vivres à la population civile. Huit Lancasters du 405e escadron ont marqué le point de visée pour les autres avions du Bomber Command afin qu'ils larguent des vivres aux Néerlandais à Rotterdam. Le décollage a eu lieu peu avant 13 heures (Lancaster Mk. III, PB282, « Y »). Nous devions servir de réserve et transportions des indicateurs de cible rouges. Nous les avons largués à seulement 350 pieds au-dessus du sol sur une zone de largage identifiée par une croix blanche. À cette altitude, nous pouvions voir les gens nous faire signe. (Remarque : le Bomber Command a effectué 2 959 vols et largué 6 672 tonnes de vivres pendant l'opération « Manna ».)
Le 9 mai 1945, jour de la Victoire en Europe, l'équipage s'est envolé pour Lubec, en Allemagne (Lancaster Mk. III, ME445, « U »); l'un des huit avions du 405e escadron chargés de récupérer les prisonniers de guerre alliés récemment libérés et de les ramener en Angleterre dans le cadre de l'opération « Exodus ». (Remarque : au cours de la semaine suivante, le 405e escadron effectua 41 sorties pour rapatrier 947 prisonniers de guerre.) Seul un équipage réduit était nécessaire, je suis donc resté à la base. Les 23 prisonniers de guerre que Don a ramenés lors de ce vol étaient dans un état pitoyable. Sur le chemin du retour, Don a dévié de sa trajectoire pour survoler Londres afin de leur montrer Buckingham Palace. Cela était strictement interdit et on l’a rappelé à Don à son retour !
Vu que le reste de l'équipage était parti rapatrier les prisonniers de guerre, je me suis rendu au village avec le reste du personnel de la base. Là, les villageois avaient installé des tonneaux de bière et de la nourriture pour célébrer le jour de la Victoire en Europe. De plus, quatre énormes projecteurs avaient été placés aux quatre coins du village pour être utilisés pendant la nuit. Lorsque l'équipage revint de Lubec, je me sentais plutôt bien.
Le soir venu, tout le monde était de bonne humeur. Al et moi avons aperçu Don qui traversait le champ avec une jeune WAAF, sachant qu'il mijotait quelque chose. Nous nous sommes donc dirigés vers un projecteur et avons braqué le faisceau sur eux. Je ne sais pas ce qui s'est passé, mais nous avons accidentellement renversé le projecteur qui s'est brisé en mille morceaux. Nous nous sommes enfuis en toute hâte.
Pour ajouter à la fête, certains membres de l'équipage sont allés récupérer le pistolet Verey et des cartouches dans l'avion. Ils ont ensuite parcouru la campagne en tirant des fusées éclairantes dans les meules de foin et de blé. Très vite, des feux ont éclaté un peu partout. Bien sûr, le gouvernement canadien a probablement dû payer pour tout cela plus tard. (Remarque : un site web consacré au village de Gamlingay, juste au sud de Gransden Lodge, cite un certain M. N.J.R. Empson, qui se souvient « des aviateurs canadiens tirant des fusées Verey dans le ciel. Ils les ont également tirées sur deux meules de maïs de Harold Jefferies à la ferme Fuller's Hill et les ont incendiées ».
Le vice-maréchal de l'air « Black Mike » McEwan et son chien Blackie. Remarquez le nom « Malton Mike » sous son drapeau de commandement sur le Lancaster derrière lui. Ce surnom lui a été donné après l'une de ses premières visites à l'usine AV Roe de Malton, en Ontario, pour voir la chaîne de montage du Lancaster X. Bien que l'histoire de Moyes ne le mentionne pas, il est probable qu'Ashby pilotait le M-Malton Mike lors du vol transatlantique avec le vice-maréchal de l'air à bord en tant que copilote, car il est documenté que McEwan a accompagné son chien lors de son retour au Canada.
Peu après le jour de la victoire en Europe, le 405e Escadron rejoint le 6e Groupe. L'escadron est l'un des huit escadrons de bombardiers de l’ARC sélectionnés pour se rendre en Extrême-Orient afin de poursuivre la guerre contre le Japon. Le 405e Escadron sera associé au 408e Escadron pour former la 664e Escadre. Le 22 mai 1945, un défilé de tous les grades a eu lieu à Gransden Lodge et le vice-maréchal de l'air Don Bennett, commandant de la Pathfinder Force, a remercié l'escadron et nous a souhaité « Bon Voyage ». Laissant nos avions derrière nous, nous avons pris le train le 26 mai 1945 pour Linton-on-Ouse, où le 408e Escadron était déjà stationné.
À Linton-on-Ouse, le 405e Escadron allait s'équiper de Lancaster Mk. X construits au Canada. Du 1er au 13 juin 1945, nous avons suivi un programme intensif d'entraînement au sol et en vol afin de nous préparer à notre vol transatlantique de retour au pays. À la mi-juin, nous étions tous prêts à ramener les avions au Canada, via les Açores, Terre-Neuve et le Nouveau-Brunswick.
Notre fourbi bouclé, nous prenions place à 9 heures le 16 juin 1945 à bord de notre avion (Lancaster Mk. X, KB957, « W ») pour commencer notre voyage de retour. À 9 h 20, les vingt Lancaster du 405e Escadron et les six avions du 408e Escadron (15 avaient décollé le 14 juin) avaient mis le cap sur le Canada. Chaque avion transportait deux membres du personnel au sol en tant que passagers. Notre première escale fut la base RAF de St. Mawgan, en Cornouailles, où nous avons passé la nuit. Tôt le lendemain matin, nous quittions pour Lagens Field (aujourd'hui Lages) dans les Açores. C’est là que nous avons fait le plein de carburant pour le long vol au-dessus de l'océan jusqu'à Gander, à Terre-Neuve.
Au cours de la traversée de l'Atlantique, nous avons volé aux côtés du Lancaster du Lieutenant d’aviation W.G. Ashby. Ashby avait été chargé de ramener clandestinement au Canada le chiot de l'aviateur « Black Mike » McEwen. À mi-chemin, Ashby signala un incendie dans l'un de ses moteurs. L'extincteur interne éteignit le feu, mais il ne lui restait plus que trois moteurs. Nous avons ralenti pour qu'il puisse rester avec nous. À environ 100 milles de Gander, un autre de ses moteurs est tombé en panne. Les ondes radio étaient « chaudes », tout le monde s'inquiétant du sort du chiot. Je suppose que l'équipage d'Ashby se demandait : « Et nous alors ? » Nous sommes restés avec eux jusqu'à ce qu'ils atteignent Gander sains et saufs. Nous avons passé la nuit à Gander et, le lendemain matin, nous avons décollé pour Scoudouc, au Nouveau-Brunswick. À notre arrivée, on nous a remis des laissez-passer et des billets de train, et on nous a dit de nous présenter à Greenwood, en Nouvelle-Écosse, dans 30 jours.
Arrivés à Greenwood vers la fin du mois de juillet 1945, nous avons trouvé la base bondée de personnel. La 664e Escadre (bombardiers lourds) a été officiellement formée à la base de l’ARC de Greenwood le 1er août 1945. Mais avant que nous puissions partir pour le Pacifique, les bombes atomiques ont été larguées sur Hiroshima et Nagasaki, et la guerre contre le Japon était terminée. Nous sommes restés assis pendant deux semaines pendant qu'ils décidaient quoi faire de nous. Finalement, on nous a proposé notre libération le 19 septembre 1945. J'ai dit adieu et souhaité bonne chance à tout le monde. Ma guerre était terminée.
Une cinquantaine de Lancaster construits au Canada sont alignés sur les rampes de la base de la RCAF à Scoudouc, au Nouveau-Brunswick, dont l'un est probablement le Lancaster Mk. X de Moyes, immatriculé KB957, LQ-W. Photo via Bomber Command Museum of Canada Collection
La vie d'un armurier après la guerre
En août 1946, l'ARC a mis sur pied un nouveau cours, appelé « cours de longue durée sur l'armement ». Le premier cours a débuté la première semaine d'août 1946. Il a duré un an. Un nouveau cours commençait chaque mois. Le dernier a débuté en février 1947, pour un total de sept cours. Je suivais le cours n° 6.
Les cours étaient composés à environ 85 % d'anciens membres d'équipage jusqu'au grade de lieutenant d'aviation pilotes, navigateurs, viseurs de bombes et mitrailleurs – dont beaucoup avaient reçu la DFC ou la DFM, d'autres étaient d'anciens prisonniers de guerre. En fait, dans le cours n° 1, il y avait un capitaine d’aviation mitrailleur, décoré de la DFC et de la barrette. À la mi-septembre 1946, le jour de la réversion est arrivé; tous les étudiants ont été rétrogradés au grade de caporal de l'air (LAC) et ont reçu un classement provisoire de métier dans le groupe 1, le plus bas possible.
Les cours comprenaient des travaux d'usinage sur des tours, des fraiseuses, etc. Nous avions reçu une formation sur les tourelles et tous les types d'armes utilisées dans les avions et au sol par les Américains, les Britanniques et les Canadiens. Nous avions appris tous les différents types de munitions et de fusées éclairantes, y compris leur stockage, leur manipulation et leur transport. Nous avons appris tous les types d'explosifs – TNT, Shellite, tungstène, etc. – et le fonctionnement de quelque 33 types de détonateurs de bombes. Nous avons étudié les bombes et leur composition – de 11½ lb à 22 000 lb – ainsi que leurs systèmes de transport et de largage.
J'ai obtenu mon diplôme en décembre 1947. La moitié des élèves a été envoyée pour l'hiver au Winter E E Flight à Watson Lake, en Colombie-Britannique. Je suis demeuré à la base de Trenton, où nous avions des Lancaster, Ventura, Mitchell, Mustang, Vampire et Harvard, tous utilisés par les pilotes en formation à l'Air Armament School. En 1951, j'ai été transféré au 420e escadron à la base de London, qui était équipé de Mustang.
130 Mustang nord-américains ont équipé plusieurs escadrons de chasse de réserve de l'ARC après la guerre, dont le 402e escadron de Moyes de 1951 à 1957.
Ron Moyes à la RAF North Luffenham en 1953, servant comme armurier au sein du 401e Escadron sur des Sabres de Canadair. Après la guerre, la plupart des aviateurs qui choisissait de rester dans l’ARC ont été rétrogradés. Moyes s'est réengagé comme caporal, mais au moment où cette photo a été prise, il avait déjà été promu caporal-chef. Remarquez la poitrine couverte de décorations militaires et ses ailes opérationnelles indiquant qu'il avait accompli un tour opérationnel complet avec Bomber Command, un exploit remarquable compte tenu de toutes les probabilités de perte associées au rôle de mitrailleur arrière. Photo: Ron Moyes Collection
En 1953, j'ai été transféré au 410e Escadron de la 1re Escadre à North Luffenham, en Angleterre, équipé de Sabre 1. Pendant mon séjour là-bas, nous avons participé en escadron à une grande école de tir à Acklington. Nous y sommes restés un mois. Plus tard cet été-là, sept d'entre nous ont été envoyés à la RAF Coltishall pour six semaines, où nous avons entretenu des Sabres remorquant des cibles pendant les exercices de tir de la 1re escadre.
De retour au Canada en tant que sous-officier supérieur (Sr NCO), je suis retourné à Trenton pour une brève période, avant de partir pour le camp Borden en tant qu'instructeur. Là-bas, avec deux autres sous-officiers supérieurs, nous avons donné des cours sur les bombes et les explosifs au dépôt d'explosifs n° 13, à Angus. Ces cours, destinés à des sous-officiers et à des officiers, enseignaient comment éventrer des bombes de 500 livres à l'aide d'explosifs. Nous avons également enseigné le maniement de la roquette air-air nucléaire de 750 livres qui était utilisée dans certaines de nos stations de commandement de la défense aérienne.
En 1962, j'ai été transféré à la 3e Escadre, à Zweibrucken, en Allemagne, car les CF-104 destinés à des frappes nucléaires y seraient basés. En attendant l'arrivée des CF-104, j'ai été chargé de la zone des explosifs et j'ai dû me débarrasser de toutes les roquettes de 2,25 pouces qui restaient des CF-100.
Le commandant m'a également confié la responsabilité de détruire la station en cas d'invasion de l'Allemagne. N'oubliez pas que c'était à l'automne 1962, au moment de la crise des missiles de Cuba, et que la situation était assez tendue dans la division aérienne. J'avais à ma disposition dix bombes de 1 000 livres pour détruire la piste, etc., et je devais également détruire tous les systèmes de communication. L'équipage y compris moi-même devions être les derniers à quitter la station.
À l'arrivée des CF-104, nous avions environ 90 armuriers sur la base, dont 48 formés au chargement et au déchargement des bombes nucléaires de 2 000 livres sur les avions. Ces 48 armuriers étaient répartis en équipes de quatre hommes. Ils devaient effectuer les vérifications de certification sur les avions chaque fois que quelqu'un débranchait une prise électrique ou retirait un pylône ou un réservoir de carburant. Ils fournissaient également un équipage pour les avions d'alerte rapide, où nous avions quatre CF-104 équipés de bombes nucléaires. Avec les pilotes, les équipages restaient dans la zone sécurisée fermée pendant deux semaines d'affilée; leurs repas leur étaient servis et ils dormaient là pendant cette période.
À mon retour au Canada en 1966, j'ai été affecté au Commandement du matériel à Rockcliffe, puis au quartier général de la Défense nationale. En 1974, j'ai obtenu ma libération et j'ai rejoint la section des armes à feu du laboratoire médico-légal de la GRC. J'y suis resté pendant 15 ans, pour un total de 46 ans dans l'ARC et la GRC.
Lorsque l'équipage s'est réuni en 1984 à Sault Ste Marie, en Ontario, le sergent de section Jake « Red » Redinger, opérateur radio, était porté disparu. Ils l'ont recherché sans succès pendant les quatre décennies qui ont suivi. Photo: The Sault Star
Je ne suis pas certain de la date de la photo du bas, mais il est clair qu'elle a été prise après 1984, car Jake « Red » Redinger (à droite) figure désormais parmi les membres de l'équipage dans cette reconstitution de leur photo d'époque. C'est peut-être l'article de journal qui a permis de retrouver Redinger. L'équipage Walkley était un groupe de pilotes extrêmement soudé. C'était peut-être parce qu'ils avaient survécu ensemble à une campagne opérationnelle complète. Beaucoup n'ont pas eu cette chance. La plupart des équipages se sont séparés après la guerre, surtout s'ils venaient de différents pays du Commonwealth. Les membres de l'équipage Walkley étaient tous Canadiens et ils ont gardé contact pour même se réunir pendant les années et les décennies qui ont suivi la guerre. Photo: Ron Moyes Collection